Séminaire de terrain à Nantes / Vidéo de l’intervention de Patrick Cohendet : les dynamiques des écosystèmes d’innovation

  • Le 21 novembre 2019
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Le 21 novembre, Patrick Cohendet a été l’invité du séminaire RELIGN, qui s’est joint au programme du séminaire de terrain de SCAENA à Nantes, et a présenté les dynamiques des écosystèmes d’innovation.

Dans son intervention, Patrick Cohendet présente l’angle théorique par lequel on aborde la créativité dans un territoire, en rappelant les grandes théories et origines de la notion d’écosystème. Il présente ensuite sa théorie de l’écosystème d’innovation et l’organisation en trois niveaux – underground, middleground et upperground -, en l’illustrant de plusieurs exemples de middlegrounds à Montréal.

Patrick Cohendet est professeur d’économie et du management de l’innovation à HEC Montréal, où il a créé le Pôle Créativité et Innovation MOSAIC. MOSAIC est décrit par Patrick Chendet comme un lieu d’articulation entre le milieu académique, composé de professeurs travaillant à comprendre le lien entre création et innovation, et le milieu industriel.

La conférence est présentée par Raphaël Suire, Professeur en management de l’innovation à l’IAE de l’Université de Nantes, membre du programme SCAENA.

 

Dans un premier temps, Patrick Cohendet présente l’angle théorique par lequel on aborde la créativité dans un territoire. Il rappelle que l’on doit à Moore le concept d’écosystème d’affaires, selon lequel l’entreprise ne doit pas être vue uniquement comme un système mais plutôt comme un univers ou un écosystème qui comprend d’autres entités formelles en plus des clients, des fournisseurs, que sont les citoyens et les usagers. Il s’agit donc d’une vision d’une firme qui se développe dans un environnement qui englobe des individus. Pourtant, pour Patrick Cohendet, cette première vision de l’écosystème est, certes, intéressante mais réductrice : Moore s’intéresse uniquement à une firme et aux contrats qu’elle passe, il en oublie les usagers, et il s’intéresse principalement à la captation de valeur.

La notion qui s’y succède est celle d’écosystème d’innovation, une notion développée par AnnaLee Saxenian dans une étude sur la Route 128 vs Silicon Valley (1994). En s’intéressant à ces deux lieux et en les comparant en termes de rayonnement ou de performance, elle arrive à la conclusion que la Route 128 est un système classique d’innovation tandis que la Silicon Valley est un écosystème d’innovation.

Un écosystème est la mise en interaction permanente entre le formel et l’informel. L’informel, c’est les communautés, le formel ce sont les firmes, les laboratoires, les unités administratives. L’écosystème est un bouillonnement permanent, une interaction incessante entre le formel et l’informel, l’informel étant la source des innovations disruptives et le formel étant celui qui va essayer de les solliciter, pour être capable d’en bénéficier, quitte à faire des erreurs. Dans un cadre systémique formel, l’échec est catastrophique. Dans un écosystème, les unités formelles ne restent pas fixes et les communautés sont sollicitées en permanence par le formel pour reconstruire le système.

Par la suite, Walter Isaacson publie The innovators, où il étudie l’histoire de la révolution digitale. Selon lui, toutes les innovations radicales qui ont permis de construire l’industrie électronique sont nées dans ce que Patrick Cohendet a appelé l’underground (dans les garages, dans les cuisines, parfois dans la rue), puis les organisations sont nées de ce mouvement ou ont capturé cette innovation pour en faire des firmes. Ainsi, Isaacson montre le rôle incontournable qu’ont joué des structures intermédiaires dans le passage des initiatives de l’underground vers l’upperground. Isaacson montre aussi que plus l’écosystème est complexe, plus le rôle de certains individus, d’orchestrateurs, est fondamental.  

« Il y a donc trois propriétés essentielles d’un écosystème d’innovation : la génération de valeur, l’attraction et surtout la résilience, le pouvoir de régénération. L’intérêt dans un écosystème d’innovation c’est de prendre en compte et d’incorporer les innovations radicales et drastiques. »

Le travail mené par Patrick Cohendet et Laurent Simon s’insère dans ce système et est en partie issu de liens très forts avec Ubisoft (avec Yannis Mallat). Deux grandes théories de la création de valeur sont posées au début des années 2000 : la première, à la Porter, pour créer de la richesse dans un territoire, il faut mettre ensemble les activités formelles dans un domaine dans un territoire donné ; la deuxième, à la Richard Florida, pour créer de la richesse dans un territoire, il faut attirer les talents créatifs. Pour les chercheurs de Montréal, ce sont deux théories intéressantes mais pas suffisantes ; l’idée est donc que pour que les idées créatives circulent, s’enrichissent de la base au sommet, il faut une couche intermédiaire, qui permettent de connecter l’underground et l’upperground. 

Patrick Cohendet rappelle ensuite dans son intervention la structure d’un écosystème d’innovation, avec :

  • Upperground : il est composé des unités formelles qui vont vers des audiences, dont un territoire a besoin pour aller vers des applications, qui concentrent les financements et qui peuvent agencer.
  • Middleground : il permet de connecter l’underground avec des structures formelles, et permet aux activités de l’underground de se faire connaître. Pour mêler l’informel et le formel, il y a quatre mécanismes principaux d’interaction cognitifs : il faut des places (lieux où les gens se rencontrent), il faut faire savoir ce que l’on fait, il faut des projets pour mélanger les communautés, et des événements qui sont une opportunité de structuration.
  • Underground : c’est le lieu où de petits collectifs créatifs déviants peuvent s’exprimer, le lieu où toutes les innovations drastiques naissent.

Dans la suite de sa conférence, Patrick Cohendet présente plusieurs exemples de middlegrounds : la société des arts technologiques à Montréal,le festival de jazz de Montréal, la TOHU, le Musée Nature de Montréal et Ubisoft.


SCAENA remercie vivement Patrick Cohendet d’avoir pris part à ce séminaire de terrain et RELIGN pour l’organisation de cette rencontre.

Mis à jour le 16 octobre 2020.
https://msh-ange-guepin.ppksup.univ-nantes.fr/manifestations-scientifiques/seminaire-de-terrain-a-nantes-video-de-lintervention-de-patrick-cohendet-les-dynamiques-des-ecosystemes-dinnovation